De notre envoyée spéciale à Timgad Wafia Sifouane Cinq soirées déchaînées se sont déjà écoulées au sein du théâtre antique de Timgad qui vit au rythme de la 3ème édition de son Festival. Un événement qui s'est enraciné dans la culture des Batnis à la recherche des rares moments où faire la fête est permis. Cette année, et vu que le commissariat du festival a opté pour l'internationalisation de cette rencontre, les gens de Batna ont pu se délecter d'agréables découvertes artistiques telles que Los Gaiteros, Injiany Aitulan ou encore le danseur espagnol Antonio Marquez. Ce dernier a fait résonner ses pas endiablés dans les ruines de Timgad dimanche dernier face à un public qui s'est déplacé en masse. Le show démarre à l'heure prévue, on distingue sur la scène huit danseurs et danseuses vêtus de tenues traditionnelles espagnoles. Les femmes en robes amples dans le style paysan et les hommes en pantalons noirs et gilets. La troupe s'installe sur des chaises dressées au milieu de la scène puis le coup d'envoi est donné. Les deux sexes opposés se défient par des pas de danse provocateurs. Gestuelles agressives. Un étrange mélange de sentiments s'empare des lieux. Un sentiment troublant qui rassemble la haine, la rage mais à la fois la passion. Tel un tableau théâtral, les danseurs ont un couple pour leader. Deux êtres qui s'aiment mais d'un amour sauvage. Le public est attentif aux moindres gestes des danseurs, des mouvements souples et parfaitement synchronisés, le tableau se clôturera par un tendre baiser qui ne laisse personne indifférent. Changement de tenues et de décor, les danseuses réapparaissent en longues robes vertes au rythme de la guitare qui laisse entendre le morceau Malo. Les danseurs se succèdent, alliant la magie de leur chorégraphie à celle des lieux. Des moments de pures sensations qui préparent l'entrée de l'un des meilleurs danseurs de flamenco Antonio, surnommé le redoutable séducteur, une vérité qu'aucune femme ne pourra nier. Doté une énergie inépuisable, le danseur se met à faire trembler la scène sous ses pieds. Le temps de se remettre de ce tourbillon, le public aura droit à une incroyable danse solo dans la pure tradition ibérienne. Ses danseurs le rejoignent pour faire tourner la tête aux gens. Ils auront droit d'ailleurs à plusieurs figures de danse réalisées dans le moindre souci du détail. Le public est ébahi et envoûté par la troupe du ballet Carmen Cantero qui accompagne Antonio Marquez. Après une telle représentation, une pause s'impose pour permettre aux gens de se remettre d'une telle audace et d'un tel talent. Les seconds à rejoindre la scène ne sont autres que le groupe algérois de world music Harmonica. Composé de six musiciens talentueux, ce groupe a réussi à fonder un style propre à lui à travers l'introduction de nouvelles sonorités dans la musique algérienne. «C'est un moyen pour nous de présenter la musique algérienne au monde», dira l'un des membres. Chacun s'empare de son instrument, guitare électrique, basse, batterie, synthétiseur et percussion pour attaquer le 1er morceau Saadi belwali qui est un diwan algérien revisité par le groupe. Le public est réceptif et ne tarde pas à le démontrer en se déchaînant. Les musiciens continueront avec certains titres de leur album Bladi et Salam pour le grand bonheur des Batni qui en sont à leur 3ème rencontre avec le groupe. Malgré les problèmes techniques rencontrés au niveau de la sonorisation, Harmonica sauve la mise et arrive à conquérir toute l'attention du public. Ayant déjà participé à plusieurs festivals de renommée tels que «Jazzouaga», le groupe en ce moment finalise son prochain opus qui sera bientôt dans les bacs. «Cette fois, nous avons essayé un nouveau style qui est el mensraf du chaabi. Ce dernier qui a la particularité d'être corsé sera revu par le groupe avec l'ajout de sonorités jazz», déclare Belkacem Lahiani, bassiste du groupe. Le reste de la soirée sera confié au chouchou du raï Kader Japonais, un artiste très apprécié par les jeunes Algériens. Il offrira à la foule un cocktail de ses tubes qu'ils ont appris par cœur. L'ambiance est électrique et Kader est en parfaite symbiose avec son public. Ce dernier qui s'inscrit dans le genre raï touche particulièrement la jeunesse algérienne en lui proposant des titres auxquels elle s'identifie à l'instar de l'amour, de l'injustice et de la misère. La soirée prendra fin sur les coups de 1h du matin, laissant derrière elle un public conquis et certain de revenir le lendemain.