Photo : M. Hacène Par Samira Imadalou Que peut-on retenir de concret de la visite de la délégation du Medef en Algérie la semaine dernière? D'emblée, on dira, pas grand-chose. En dehors des messages d'apaisement et d'engagement à travailler dans le nouveau cadre économique algérien, rien d'autre à signaler. Aucune annonce particulière, n'a, en effet, été faite par l'organisation patronale française, venue en Algérie en réponse à l'invitation du Forum des chefs d'entreprise (FCE). La mission du Medef s'est donc limitée à la compréhension, comme l'a souligné le président d'honneur de l'organisation à l'ouverture des discussions entre hommes d'affaires français et algériens lors du premier jour de la visite. François Perigot l'a bien dit : «Nous sommes venus comprendre et coopérer.» Mais la recherche d'explications et la compréhension de la loi de finances complémentaire 2009 l'ont emporté sur la coopération. Les opérateurs économiques français, dont les représentants ont eu à rencontrer de hauts responsables de la sphère économique algérienne et leurs homologues du FCE, ont, certes, reçu les explications essentielles au sujet de la LFC 2009. Une loi pour laquelle ils ont affiché leur engagement à s'adapter mais, en parallèle, ils n'ont fait aucune proposition intéressante à court terme. Reconnaissant les potentialités économiques de l'Algérie Reda Hamiani, président du FCE, a porté à leur connaissance dans son discours, les Français du Medef sont restés dans l'incertitude quant au montant d'investissement à prévoir. «Le montant des prochains investissements français en Algérie peut aller au-delà de cinq milliards de dollars tant l'Algérie est un pays riche qui présente d'énormes potentialités pour les firmes françaises», a indiqué, mardi dernier à Alger, la présidente du Medef, Mme Laurence Parisot, au terme de sa visite. Et d'ajouter : «Investir plus de cinq milliards de dollars dans les prochaines années est un objectif que la France peut réaliser car nous sommes présents dans pratiquement tous les secteurs stratégiques de l'Algérie, comme l'énergie, l'eau et les transports.» Mais ce chiffre de 5 milliards de dollars n'est pas nouveau. Il avait déjà été évoqué par le président Français Nicolas Sarkozy lors de sa visite en Algérie en décembre 2007. Il est d'autant insignifiant, en dehors des hydrocarbures, puisqu'il comprend le projet de Total en Algérie dans le cadre d'un contrat conclu avec Sonatrach pour le vapocraquage d'éthane à Arzew. La France, qui se retrouve aujourd'hui concurrencée par d'autres pays, à l'image de l'Italie, de la Chine et de l'Espagne, sur le marché algérien a encore beaucoup à faire pour garder sa place en Algérie. Le temps est donc à l'action pour un pays dont les investissements hors hydrocarbures en Algérie restent faibles avec un montant de 320 millions de dollars, tel qu'annoncé par François Perigot. Il faut dire que, côté qualité et type d'investissements, les propositions ne sont pas aussi importantes que tente de le faire croire le Medef. La liste des 60 hommes d'affaires venus en Algérie le montre clairement. Les hôtes du FCE représentent, en effet, pour la plupart, les services alors que les attentes de l'Algérie concernent de nombreux secteurs tels que le médicament et l'industrie automobile. Pour ces deux segments, Parisot a parlé «de discussions secrètes». Attendons donc pour voir l'issue de ces discussions et attendons aussi le contenu de la feuille de route que le Medef et le FCE ont convenu de tracer dans le but de renforcer la coopération institutionnelle entre les deux organisations et d'élaborer un programme de rencontres sectorielles entre les entreprises algériennes et françaises. Pourvu que ces rencontres donnent des résultats pour mettre un terme à la frilosité des Français et développer un partenariat gagnant-gagnant entre les deux pays. Car l'Algérie a beaucoup plus besoin d'intégrer et de diversifier son économie, donc de transfert de technologie, que de continuer à importer en masse. Un point qu'a souligné à maintes reprises le président de la République, M. Bouteflika, dans ses discours, notamment à l'occasion de l'ouverture officielle de l'année universitaire 2009-2010 à Sétif : «La problématique du transfert, de la consécration et de la reproduction des connaissances et de leur application, en vue de permettre aux entreprises d'améliorer leurs performances et leur potentiel compétitif, constitue un enjeu économique et social de première importance.» Hamiani l'a également souligné devant les opérateurs français : «Cette politique nouvelle [politique économique, ndlr] a besoin d'aide, de conseils et d'appui de la part de nos partenaires.» C'est dans ce cadre que veut travailler l'Algérie, non seulement avec les Français mais avec l'ensemble des partenaires. Exemples de partenariat Des exemples de partenariat entre les deux pays dans le secteur des services ont été présentés la semaine dernière. Ainsi, dans le domaine des assurances, le groupe français Macif et la SAA sont en phase de lancer la première compagnie d'assurance vie en Algérie avant de se pencher l'année prochaine sur une société de réassurance. Les deux sociétés comptent par ailleurs se lancer dans des opérations de rapatriement de personnes décédées à l'étranger dans le cadre d'un accord avec une moyenne annuelle de 5 000 dépouilles. La Macif est intéressée par le marché de l'assurance des personnes, un marché encore vierge en Algérie puisqu'il ne représente, selon M. Latrous, que 10% du chiffre d'affaires (1 milliard de dollars) du secteur pour un marché estimé à 10 milliards de dinars. On note aussi un autre projet d'appui français à la production laitière en Algérie. La Banque mondiale prête à s'impliquer dans des projets d'investissement algéro-français Alors que Total, par le biais de son représentant à la rencontre Medef-FCE, estime que les mesures de la LFC sont un peu contraignantes pour le groupe à l'avenir, notamment pour les réinvestissements lourds, le responsable du développement de la Banque mondiale à Alger notera que la LFC n'a rien d'extraordinaire par rapport aux autres pays. Il a cité à cet effet l'exemple de l'Afrique du Sud où le développement du capitalisme local a réussi. Toutefois, a-t-il noté, l'aspect financier est à améliorer en Algérie. «On ne s'improvise pas capitaliste du jour au lendemain», a noté le représentant de la Banque mondiale. Et d'afficher l'engagement de cette institution à accompagner les projets de partenariat entre la France et l'Algérie. «La Banque mondiale est prête à être partenaire dans des projets, aussi bien avec la partie française qu'algérienne avec lesquelles elle partagera.» Cet engagement sera assuré par la filiale de la BM, la Société financière internationale (SFI), qui appuie le secteur privé à travers le monde. Les 51% du partenaire algérien dans les différents projets, tel que stipulé par la nouvelle réglementation, pourraient impliquer ainsi la BM. Cette proposition a été bien accueillie par le FCE. «La solution de la Banque mondiale intéresse le FCE», a déclaré à ce sujet Hamiani. Lequel n'a pas manqué d'invoquer la disposition qui stipule que pour toute filiale d'une entreprise étrangère qui doit être détenue à 51% par un partenaire algérien, il soit permis d'assurer à l'investisseur étranger de disposer de 100% de la gestion de la filiale en question.