De notre correspondant à Constantine Nasser Hannachi
Le rapt s'étend en Algérie et frappe les enfants et la frange juvénile. Un phénomène dramatique affectant tel un germe les cités notamment nouvelles, dépourvues du minimum de couverture sécuritaire recommandé. «Lutter contre ce fléau est l'affaire de tout le monde : voisins, citoyens, policiers et parents», lancent certaines personnes. Néanmoins, les deux crimes odieux perpétrés contre les petits Ibrahim et Haroun à la nouvelle ville Ali-Mendjeli, dans la wilaya de Constantine, le 13 mars dernier, ont exhumé toute la colère des populations. Le phénomène de rapt d'enfants s'est répandu d'une façon vertigineuse en Algérie. Plus de 204 cas ont été enregistrés en 2012 à travers le pays, selon le dernier bilan de la Sûreté nationale. Ces enfants ont eu la chance d'être remis sain et sauf à leurs parents. Malheureusement ce ne sera pas le cas pour Chaïma, Haroun et Ibrahim, sauvagement assassinés par leurs ravisseurs. A peine les populations se sont-elles remises sinistrement du feuilleton dramatique de la petite fillette, des bourreaux à l'est sèment la terreur et privent deux familles de leur précieux cadeau divin. Relançant la psychose des kidnappings d'enfants. «Peine de mort, peine de mort,…». C'est ce que revendiquent les citoyens pour mettre un terme à ces faits qui ne reflètent guère le fondement de la société algérienne, déstabilisée par ces forfaits abominables. Les Constantinois demeurent toujours offusqués, choqués après les crimes perpétrés la semaine passée contre les deux bambins, Haroun (10 ans) et Ibrahim (9 ans), enterrés mercredi dernier à Zouaghi. Le kidnapping d'enfants demeure un sujet très sensible. Un phénomène nouveau en Algérie, mais qui a généré ses affres dépassant toutes les limites. «Sans mesures draconiennes assorties de sanctions maximales envers les ‘'infâmes'', nos enfants seront toujours dans le collimateur des ravisseurs», martèle la population «vomissant» les auteurs du crime. C'est la réaction qui a succédé à l'annonce par le parquet de l'arrestation des deux présumés criminels ayant enlevé et «étranglé» les deux enfants. La quasi-totalité de la population revendique le rétablissement de la peine de mort dans ce cas précis, car les fondements de la société sont secoués. «Personne ne pouvait s'imaginer qu'un jour il existerait ce genre de délit cruel à Constantine. Personnellement, je suis glacée et affectée au plus profond de mon âme», s'indigne une mère. Pourtant, l'enlèvement, en janvier dernier, de la jeune Chaïma aurait bien pu déjà déclencher une alerte maximale pour mettre en place les mesures nécessaires qui prémuniraient cette frange vulnérable, les écoliers notamment. Aujourd'hui, le drame de la nouvelle ville Ali-Mendjeli ne saurait laisser les pouvoirs publics, les associations, les collectivités locales et les citoyens insensibles. Pour l'heure, seuls les parents tentent de prémunir leurs enfants contre ce phénomène aux abords des cités et des établissements scolaires, en accompagnant leur progéniture sans relâche et guettant le moindre mouvement suspect. C'est en somme la psychose. «Cette situation interpelle une implication multiple», soutient un citoyen. Les dernières statistiques font état de plus de 1 000 enlèvements de personnes commis depuis 2001, dont 25 assassinés en 2007, avec une nette augmentation en 2012. Une fréquence alarmante et qui doit être prise au sérieux avec comme background un plan drastique pour endiguer le mal, car «le kidnapping est une opération éclair qui nécessite une intervention rapide», confie un élément des services de sécurité, insistant sur le fait que le danger guette tous les enfants d'Algérie. C'est pourquoi il est impératif de se pencher sur le sujet sans tarder. «Combien de fois n'a-t-on eu des cas de récidives de la part de repris de justice ?», a-t-il déploré. La solution préconisée est la mise en place d'une cellule spécialisée qui chapeauterait tous les services concernés par ce fléau meurtrier, inhumain. «A commencer par un durcissement des peines, que ce soit pour les tentatives d'enlèvement ou pour les crimes odieux», dira un avocat. Pour sa part, le président de la Commission nationale consultative pour la promotion et la protection des droits de l'Homme (Cncppdh), Farouk Ksentini, n'a cessé de revendiquer, depuis la multiplication de ce genre d'actes, un durcissement des sanctions pénales avec en sus «une loi sur la récidive». Le mobile des kidnappings est resté pour le moins inexpliqué si ce n'est des «sévices sexuels» sur les enfants. «La pédophilie s'est accentuée ces dernières années. Mais ayant toujours été un sujet tabou, elle contraint les innocents à garder le silence et leurs séquelles restent enfouies, sans les divulguer de peur d'être ‘‘trahis'' ou insultés injustement par la société. C'est pourquoi il faut instaurer des cellules psychologiques spécialisées pour des enfants ayant été arrachés sains et saufs des mains de leurs ravisseurs», soutient un médecin, qui s'est abstenu de se prononcer sur l'autre mobile souvent évoqué, mais jamais officiellement déclaré et reconnu, à savoir le trafic d'organes.