A peine les bourgeons de la reprise économique pointent-ils le bout de leur nez, que les manœuvres commencent sur les marchés pétroliers. Il est vrai que les prix du brut se maintiennent autour des 70 dollars malgré la progression des stocks stratégiques, ce qui nourrit des craintes au sein des pays consommateurs par rapport à une nouvelle envolée des prix du pétrole dès 2010. Dans ce sens, le directeur de l'Agence internationale de l'énergie a estimé qu'une augmentation rapide des cours du pétrole pourrait saper les espoirs de reprise économique mondiale, mais que l'impact des niveaux actuels, autour de 70 dollars le baril, est difficile à évaluer. "Si le prix [de l'or noir] continue à augmenter, cela pourrait créer des problèmes", selon le degré de solidité de la reprise économique, a indiqué Nobuo Tanaka à la presse. "L'état actuel de la demande de pétrole ne traduit aucune reprise économique sensible, donc nous surveillons [l'évolution de la situation] avec prudence", a-t-il précisé. Il est encore "difficile de savoir" si un baril de pétrole à 70 dollars est un élément problématique pour l'économie mondiale, a-t-il ajouté. De son côté, l'Union européenne a adopté une directive obligeant les Etats membres à maintenir un niveau minimal de stocks de pétrole ou de produits pétroliers. Cette directive, publiée par le Conseil de l'UE, doit remplacer toute la législation communautaire existant dans ce domaine et vise à améliorer le fonctionnement des mécanismes actuellement en vigueur dans l'UE en matière de stocks de pétrole, de façon à garantir la disponibilité de pétrole en cas de crise. A cette fin, elle vise à améliorer le cadre réglementaire et à renforcer différents éléments de la pratique en matière de stockage dans l'UE, en encourageant par exemple les Etats membres à créer des entités centrales de stockage qui ont pour rôle l'acquisition, le maintien et la vente de stocks pétroliers aux fins de cette directive ou en vue de se conformer aux accords internationaux concernant le maintien de stocks pétroliers. En outre, les Etats membres assureront, au plus tard le 31 décembre 2012, le maintien à leur profit, sur le territoire de l'UE et de façon permanente, d'un niveau total de stocks pétroliers équivalant au moins à la plus grande des quantités représentées, soit par 90 jours d'importations journalières moyennes nettes, soit par 61 jours de consommation intérieure journalière moyenne. Par ailleurs, la directive prévoit l'obligation pour l'ensemble des Etats membres de maintenir au moins 30 jours de stocks ou un tiers de leur obligation de stockage sous la forme de produits raffinés. Elle propose également la création volontaire de stocks spécifiques, c'est-à-dire de réserves de produits spécifiquement établies aux fins de cette directive laquelle vise, en outre, à aligner les règles internes de l'UE sur l'action menée par l'Agence internationale de l'énergie en ce qui concerne la mise en circulation de stocks de pétrole de sécurité. Pour ce qui est de la périodicité de la communication d'informations sur les stocks de pétrole, le texte arrêté stipule que les Etats membres communiqueront à la Commission un relevé statistique mensuel portant sur les niveaux des stocks commerciaux détenus sur leur territoire national. Sur cette base, la Commission publiera un relevé statistique mensuel relatif aux stocks commerciaux dans l'UE. Il faut dire néanmoins que même si les prix pétroliers ont, contre toute attente, continué à progresser alors même que les stocks ont augmenté, les craintes d'un "pic pétrolier", l'impact de la demande chinoise et l'inflation ont stimulé l'intérêt pour les contrats à terme, soutenant ainsi leurs prix. Ces éléments font en outre que les contrats à court terme sont moins chers que ceux dont la livraison est plus tardive, cet écart rendant extrêmement rentable d'acheter du brut, de le stocker et de le revendre à une date ultérieure. En avril dernier, avec un levier de 80%, un coût de l'emprunt de 3% et des coûts de stockage de 50 cents le baril par mois, acheter du brut physique et le revendre 12 mois plus tard permettait de dégager des rendements supérieurs à 50%. Mais une menace plane avec l'aplatissement de la courbe des contrats que l'on observe actuellement. Depuis fin juillet, la différence entre contrats à court terme et long terme s'est réduite de moitié, le contrat à 12 mois s'échangeant actuellement environ 5 dollars au-dessus du prix du contrat à 1 mois. Si l'on prend les mêmes données que dans l'exemple précédent, l'achat de brut et sa revente à 12 mois engendrent désormais une perte de 18%. Et il est à cet égard révélateur que les stocks des Etats-Unis, qui utilisent un quart de la totalité du pétrole mondial, baissent depuis début août, même s'ils demeurent élevés. Faute d'une reprise économique en V, il y a donc un risque de liquidation des stocks. Ce qui provoquerait à coup sûr un renversement sur le marché pétrolier et induirait une chute des cours au lieu d'un redressement. Samira G.