Décidément, le règlement des dossiers du front social est régi par les pratiques répressives de tout mouvement de protestation. Les revendications sociales des corporations au sein de deux secteurs-clés, à savoir la santé et l'éducation nationale, ont été évincées à coup de décision de justice. Pourtant les autorités algériennes ne parlent que de l'édification de l'Etat de droit, Etat providence, où la séparation des pouvoirs est instaurée. Hélas, en réalité dès que les gouvernants se heurtent aux revendications sociales des travailleurs de la fonction publique, pourtant reconnues légitimes par la tutelle, ils font appel au pouvoir judiciaire. Est-ce là une manière d'agir ? A priori, oui, puisque le recours aux décisions de justice pour réprimer les mouvements de grèves qui secouent le secteur de l'éducation et de la santé, a porté ses " fruits ". En effet, après les syndicats des enseignants qui ont dû céder aux menaces exercées par la tutelle, qui a brandi la décision de justice consacrant " l'illégalité de la grève ", c'est au tour des blouses blanches de subir le même sort. Après près de trois mois de lutte syndicale acharnée, caractérisée entre autres par des grèves cycliques puis ouvertes, des sit-in devant les institutions de l'Exécutif, tentative de marche sur la présidence de la République, l'intersyndicale des praticiens de la santé publique a finalement cédé devant les menaces de révocations proférées à leurs encontre par le ministre de la Santé et de la Réforme hospitalière, Saïd Barkat. L'intersyndicale des praticiens de la santé publique a finalement cédé au chantage et décidé de geler son mouvement de grève. L'annonce est faite hier, lors d'une conférence de presse animée part le Dr Mohamed Yousfi, président du Syndicat national des praticiens spécialistes de la santé publique (Snpssp). En effet, lundi dernier, Saïd Barkat avait affirmé que la justice avait qualifié d'illégale cette grève et avait évoqué dans un communiqué " une retenue sur salaire pour l'ensemble des journées de grève et l'envoi de mises en demeure individuelles à l'ensemble des praticiens pour abandon de poste ". Le ministre envisageait également des "mesures de révocation contre tout praticien qui n'aura pas rejoint son poste de travail ", indiquait son communiqué. Les revendications de l'intersyndicale portent essentiellement sur le statut particulier, le régime indemnitaire, le respect du droit à l'activité syndicale et le droit à la cessibilité du logement. Mettant en évidence qu'au cours de cette période de grève, les deux organisations assuraient un service minimum dans les hôpitaux. Ainsi les pouvoirs publics ont triomphé une fois encore dans leur duel, les opposant aux voix des corporations qui veulent vivre dignement. Après cet épisode de recours aux décisions de justice pour apaiser les tensions sociales, l'on s'interroge sur le devenir des libertés syndicales, consacrées par la Constitution de la République.