Le géant gazier russe Gazprom s'est opposé, mercredi, à l'implication de compagnies étrangères dans la mise en valeur des ressources minières russes. Le vice-président de Gazprom, Alexandre Ananenkov, cité par les agences Interfax et Ria Novosti depuis Novossibirsk (Sibérie), a, en effet, déclaré qu'"en ce qui concerne l'exploration des gisements par les compagnies étrangères, notre attitude est négative". Selon lui, Gazprom ne veut pas que se répète la situation avec les projets Sakhaline et Sakhaline II. "Nous rencontrons des problèmes lorsque les licences d'exploration appartiennent à des groupes étrangers dans le cadre des projets Sakhaline-1 et Sakhaline-2" , a souligné M. Ananenkov. Il a, par ailleurs, ajouté que ces étrangers "ont l'intention de ne rien faire pour les consommateurs russes en Extrême-Orient et veulent vendre du gaz à l'étranger". Ces déclarations du vice-président de Gazprom interviennent deux jours après celles du ministre russe des Ressources naturelles, Iouri Troutnev, qui avait, pourtant, annoncé, lundi, que les groupes étrangers pourraient participer à l'exploration des gisements stratégiques russes, indiquant que cela se fera aux termes d'amendements préparés par le ministère. "Si auparavant les groupes contrôlés en majorité par des étrangers n'avaient pas le droit de participer aux enchères sur l'exploration de gisements stratégiques", ils pourront le faire "sur décision d'une commission gouvernementale", a-t-il expliqué. Cette attitude négative du géant gazier russe Gazprom ne fera qu'exacerber l'Union européenne, principale partenaire de la Russie, d'autant que, dans les grandes lignes du partenariat énergétique entre les deux parties, est inscrit la refonte des "monopoles naturels" et l'ouverture du marché énergétique russe à une concurrence accrue. Il faut dire que l'EU a, depuis déjà un moment, accusé la Russie d'utiliser toutes les opportunités de l'ouverture à la concurrence du marché de l'énergie pour prendre pied dans de nombreuses entreprises européennes. Elle l'accuse aussi de tout faire pour conserver son contrôle sur les conditions d'extraction et son monopole sur le transit du gaz et du pétrole sur son territoire, même quand il vient des Républiques d'Asie centrale. Mais peut-on réellement reprocher à Gazprom une telle attitude quand pour sa part la Commission européenne élabore un package de directives pour justement rétrécir l'accès des compagnies non européennes au marché énergétique communautaire. Il serait utile de rappeler que la séparation patrimoniale des sociétés énergétiques prônée par Bruxelles vise essentiellement à contrer l'entrée de Gazprom dans de nombreuses entreprises européennes. C'est dans ce contexte difficile que le dialogue énergétique peine à se nouer. Bien sûr, au sommet de Mafra (octobre 2007), les dirigeants russes et européens ont cherché à montrer que celui-ci ne fonctionne pas à vide : un projet d'alerte précoce et d'échanges d'informations a été décidé pour prévenir toute crise potentielle d'approvisionnement. Mais que cela ne trompe pas, les relations énergétiques UE-Russie sont en fait traversées par des contradictions aussi bien internes aux deux parties qu'externes des deux côtés, ce qui implique que, au fond, des incompatibilités majeures subsistent sous les accords de façade. Du côté européen, l'équation énergétique semble procéder de variables incompatibles. L'Union européenne exige une chose et son contraire.