De notre correspondante à Rome, Aïcha Abdeslem L'Italie compte encore ses morts du coronavirus, surtout en Lombardie (Milan). Mais les industriels du Nord font pression sur le gouvernement pour reprendre de l'activité. Pour leur part, les autorités conseillent la prudence et veulent maintenir les écoles fermées jusqu'à septembre. L'épidémie de Covid-19 a lourdement frappé la péninsule qui a enregistré un lourd bilan dû à cette infection contagieuse, 178.972 personnes atteintes de coronavirus dont 23 660 en sont décédées (chiffres publiés dimanche 19 avril). Mais après quarante jours d'un confinement drastique, durant lequel les citoyens ne peuvent pas sortir de chez eux, sauf pour des motifs vitaux, comme travailler, se soigner ou se procurer de la nourriture, la lassitude se fait sentir et le moral des Italiens accuse de plus en plus mal le coup. Surtout les familles obligées de garder reclus leurs enfants 24 heures sur 24. Les associations des parents d'élèves souhaitent une réouverture des établissements scolaires, mais les autorités restent très sceptiques. Par contre, certaines villes du Nord affirment être en mesure d'accueillir les élèves avant l'automne mais en les divisant en deux tournées, afin de respecter les règles de distanciation sociale. En attendant, tout le pays suit la méthode de l'enseignement à distance grâce aux leçons et évaluations des élèves par voie télématique. Les entreprises qui ouvrent de nouveau sont elles aussi obligées de faire respecter les mêmes règles de séparation physique et de fournir gratuitement toutes les protections à leur personnel. Il faut dire que 2,2 millions d'entreprises restent fermées avec leur 4,7 millions d'ouvriers en congé payé. A ce propos, les régions italiennes se sont inventées, chacune, son propre modèle. Ainsi, la Toscane a déjà autorisé huit mille usines à reprendre l'activité productive, après que les préfectures locales eurent certifié l'existence de conditions idoines pour ce faire. La Vénétie a également affirmé «avoir levé de fait le confinement» et la Lombardie, région la plus touchée par la pandémie, veut suivre son exemple. Mais les villes du Sud, qui ont été beaucoup moins frappées par le Covid-19, avertissent le gouvernement qu'en cas de levée prématurée du confinement au Nord, elles fermeront leurs frontières pour se protéger du risque d'une contagion ultérieure. Pourtant, certains experts en infectiologie affirment que l'isolement est efficace seulement les premiers 17 jours de la quarantaine. Après cela, les mesures de confinement n'influeront pas vraiment sur le nombre de malades contaminés ni sur celui de ceux hospitalisés. Le grand casse-tête demeure, toutefois, la gestion des transports publics. Le gouvernement voudrait généraliser le téléchargement d'applications permettant de localiser les usagers contaminés, suivant le modèle sud-coréen et mesurer la température des voyageurs avant de les laisser monter dans le métro. Concernant les lieux de commerce, si les librairies, les boutiques d'articles pour enfants et les fleuristes ont été autorisés à reprendre l'activité, en respectant la règle d'un client à la fois dans les magasins qui ne dépassent pas les quarante mètres carrés de superficie, très peu d'entre eux ont ouverts. En attendant la date fatidique du 4 mai prochain, lorsque le pont de la fête du travail sera passé, et les déplacements massifs entre régions dépassés pour prendre la mesure du réel retour à la normale. Ce qui est certain, c'est que les habitudes des Italiens vont radicalement changer, et les autorités préviennent déjà : «Il faudra oublier la chose appelée ‘'les heures de pointe''.» Le quotidien de la péninsule sera rythmé à la cadence des tournées, des files respectant la distanciation et ceux qui ont plus de 37,5 de fièvre ne seront pas autorisés à quitter leur domicile. En attendant un vaccin salvateur qui ne sera accessible qu'après, 12 voire 18 mois, annoncent les plus sceptiques des scientifiques. A. A.