Désormais, c'est la question qu'il faut poser. Qui est Israël? Que veut Israël? La demande d'adhésion de la Palestine à l'ONU avait induit la levée de boucliers de la part d'Israël et des Etats-Unis. Comment expliquer une telle attitude alors qu'une admission de la Palestine contribuera à la clarification de la donne géopolitique tout en facilitant le retour à la table de négociations dès lors que ce seront deux Etats se reconnaissant mutuellement qui auront à apurer leur contentieux afin de permettre le retour de la paix dans la région. Or Israël, par ses provocations, par les constructions indues de logements dans les territoires occupés palestiniens, a constamment donné un signal négatif quant à sa disposition de sérieusement négocier la paix. Face donc aux blocages des pourparlers de paix israélo-palestiniens, il semble impératif de revenir sur le contexte même du conflit proche-oriental. Les négociations - entamées à Madrid en 1991, il est important de le souligner - dont l'objectif premier était l'érection d'un Etat palestinien indépendant et l'instauration de la paix et la sécurité au Proche-Orient, y compris pour la Palestine, n'ont finalement abouti à aucune solution concrète. Les vingt dernières années de négociations (du moins ce qui en tenait lieu) auront surtout permis à Israël de conforter la colonisation des territoires palestiniens occupés (Jérusalem-Est et Cisjordanie) comme de travailler à rendre l'existence d'un Etat palestinien peu viable par la multiplication de colonies dans la ville Sainte et en Cisjordanie occupées. La «communauté internationale» - en fait les Etats-Unis et l'Union européenne - qui appelle à la reprise des pourparlers entre les deux parties, s'est gardée, en revanche, de mettre cartes sur table en posant, singulièrement, la question fondamentale et sous-jacente des frontières. C'est de fait, la question essentielle qui méritait une réponse précise et argumentée tant de la part de l'ONU, maître d'oeuvre du partage de la Palestine historique en novembre 1947, que des parrains du processus de paix (les Etats-Unis, l'Union européenne et la Russie, membres, avec l'ONU, du Quartette pour le Proche-Orient) si l'on veut que les négociations aient un sens et engagent belligérants et communauté internationale. Les Etats-Unis et l'Union européenne qui regardent le mouvement palestinien Hamas, comme une organisation «terroriste», n'en exigent pas moins de celui-ci qu'il reconnaisse l'existence d'Israël. Sans trop nous appesantir sur l'absurdité d'une telle demande (depuis quand un mouvement de libération - Hamas en l'occurrence - a-t-il qualité pour reconnaître un Etat d'une part, d'autre part, comment exiger d'une organisation présumée «terroriste» de reconnaître un Etat qui est en même temps une puissance nucléaire?) relevons néanmoins cette anomalie qui pose un problème fondamental: quel Israël demande-t-on aux Palestiniens de reconnaître le droit à l'existence? S'agit-il de l'Etat hébreu créé par la résolution 181-II du Conseil de sécurité, le 29 novembre 1947, lequel s'étend sur 55% de la superficie de la Palestine historique? Est-ce celui issu de la guerre de 1948-1950 s'étalant sur 78% de la Palestine? Ou, enfin, l'Israël de la guerre de 1967, qui a occupé les 22% du territoire palestinien restant, lequel englobe donc 100% de la Palestine historique? On constate soudain que l'on ne sait pas finalement quelles sont les frontières d'Israël - lequel poursuit sans désemparer de reconfigurer Jérusalem-Est et la Cisjordanie occupées - qui n'a pas de limites officielles connues et reconnues par la communauté internationale. Celle-ci et l'ONU, estiment cependant illégale l'occupation par Israël des territoires palestiniens (lesquels?), et ne reconnaissent pas l'annexion de Jérusalem-Est. Mais encore faut-il que cette position soit exprimée officiellement, par les gardiens du droit international, tout en exigeant d'Israël de borner ses frontières pour qu'une reprise des négociations ait enfin un sens. Israël, qui impose son diktat au monde est, au final, le seul pays au monde qui n'a pas de frontières. Est-ce normal?