Reprocher aux journalistes de véhiculer une image négative de la femme, reviendrait à leur dénier le droit de faire leur travail d'informer. Il y a un véritable décalage entre l'image de la femme dans les médias et sa dure réalité sociale. Des images négatives des femmes, dans une position sociale toujours subordonnée, favorisent et permettent la banalisation de la violence, voire même la justifient. Cette représentation des femmes est une violence et produit de la violence parce qu'elle entretient et perpétue les discriminations en niant les changements sociaux, la diversité des situations des femmes, et leurs aspirations à une vie d'être humain ayant droit à la sécurité et à la dignité. C'est la conclusion de l' «étude» rendue publique, hier par le réseau Wassila /Avife intitulée: «violences contre les femmes et Médias». Présentant l'étude lors de la 3e rencontre avec la presse, portée sur la sensibilisation sur la violence faite aux femmes, organisée hier à Alger, Mme Fatma Oussedik, sociologue et membre du réseau Wassila /Avife a indiqué que la presse produit souvent des modèles sociaux qui servent de mesure standardisée pour les comportements individuels, masquant les enjeux sociaux des situations concrètes. Et d'ajouter: «Les médias pensent adopter une démarche dévalorisante de ces modèles par référence, dans les articles, à une composante morale». Tout d'abord, notre sociologue qui ne feint pas d'ignorer que le journaliste ne fait que rapporter les faits et contribue à la sensibilisation contre la violence faite aux femmes. Et le père de la sociologie moderne, Emile Durkheim nous a bien appris que quand on aborde une situation ou un phénomène social, «il faut éloigner systématiquement les prénotions». C'est à dire qu'il faut étudier les phénomènes sociaux, comme si c'étaient «des choses.» Ainsi, reprocher aux journalistes de véhiculer une image négative de la femme, reviendrait à leur dénier le droit de faire leur travail d'informer, et ce serait aussi se voiler la face en laissant supposer que certains cas de violence ne sont qu'une vue de l'esprit. Aussi reprocher à un caricaturiste de mal représenter la femme, serait ignorer l'esprit même d'un dessin de presse, qui allie symbolique et dérision. Cependant, il est indéniable que l'Algérie subit des transformations rapides, notamment en ce qui concerne les femmes, les familles et les violences sociales. Ce qui fait que les médias doivent pouvoir accompagner ces changements dans le sens de la promotion des valeurs humaines. «Nous avons bien ciblé la presse en vue de son influence, afin de faire prendre conscience aux gens de cette affaire qui menace la société entière pour alerter les pouvoirs publics et les pousser à prendre des mesures», a-t-elle souligné tout en insistant sur la responsabilité des journalistes dans la lutte collective contre cette violence faite contre ses tranches sociales vulnérables, en approfondissant le débat public sur cette affaire. Pour sa part, Mme Dalila Iamarene Djerbal, sociologue et membre du réseau a regretté le fait que la manière dont certains médias rapportent les cas de violence, reflète un langage dévalorisant bien qu'ils soient appelés à agir comme catalyseur du changement social en vue de leur importante sphère d'influence. Par ailleurs, évoquant le sujet de la violence, Mme Louisa Aït Hamou, présidente du réseau Wassila /Avife, a affirmé qu'aujourd'hui, parler de la violence à l'égard des femmes est certainement moins tabou grâce au travail du mouvement associatif. Elle a aussi annoncé le lancement prochainement d'une campagne sur le projet de loi criminalisant la violence établi par un collectif d'associations. Mme Aït Hamou a avancé des statistiques alarmantes. Selon les services de la Gendarmerie nationale, plus de 5700 femmes ont subi des violences, dont 261 ont trouvé la mort durant les huit premiers mois de 2012. C'est à dire environ 24 femmes âgées de 18 à 30 ans sont violentées chaque mois. Par contre, selon la Dgsn, 7 422 femmes ont été violentées durant les 10 premiers mois de 2012 où la majorité des cas, soit 3 477 cas, ont été enregistrés en milieu familial. Malheureusement, les personnes âgées ne sont pas épargnées. Selon la présidente du réseau, ces chiffres ne représentent que la partie visible de l'iceberg, puisqu'en réalité les chiffres sont à doubler si ce n'est pas plus.