Le discours résolument et absolument réconciliateur de Bouteflika peut aboutir à une «deuxième vague de repentis». La «réconciliation nationale» occupe aujourd'hui un espace largement plus grand que les actes de violence liés au terrorisme islamiste. La réélection d'Abdelaziz Bouteflika à la tête de l'Etat remet au jour son projet de «passer de la concorde civile à une véritable réconciliation nationale» et dont personne ne connaît avec exactitude les «limites» et les contours, et donne toute sa place à la deuxième phase de la paix civile. Cependant, en arrière-plan de cette réconciliation, le terrorisme réactive peu à peu ses mécanismes. Le Gspc répond en écho au GIA. Le premier a tué trois militaires qui étaient en ratissage à l'est de Boumerdès, et en a blessé dix autres, alors que le second, «oublié» depuis plusieurs semaines, a assassiné, dans un faux barrage dressé à Hameur El Aïn (là même où, il y a une année, il avait assassiné trois citoyens qui roulaient en R4, vers un domaine agricole situé à la sortie sud de la ville). Il y a une semaine, deux militaires ont été tués dans une embuscade tendue par des éléments du groupe des Houmat eddaâwa essalafiya dans les massifs forestiers de Saïda. Deux jours après, deux islamistes armés avaient été tués dans la région de Sidi Bel Abbès, et deux autres dans les régions de l'est du pays où domine le Groupe salafiste pour la prédication et le combat. Entre les «irréductibles» et les «velléitaires» de la trêve, il y a heureusement un espace de négociation, de concession et de dialogue. Mené sans cesse depuis plusieurs années, le dialogue avec les maquis islamistes connaît une certaine ferveur ces jours-ci, sans connaître les résultats importants dont parle la presse. Trois repentis ont réellement regagné la vie civile dans la région de Bouira, alors que dans les maquis de l'Est, les contacts, menés laborieusement avec le Gspc, laissent espérer que certains hommes de cette organisation «tricéphale», qui a éclaté en trois directions quasi-autonomes, pourraient annoncer une trêve des hostilités et quitter les maquis de l'Est algérien. Cependant, et à la lumière des fetwas qui circulent au sein même de la direction, et signées par Nabil Sahraoui, ou, avant lui, par Hassan Hattab, il est peu probable que la trêve du Gspc connaisse une poussée de paix ou qu'elle trouve preneur en nombre. La cellule opérationnelle, qui a investi la capitale, et qui se spécialise dans les attentats ciblés et la collecte d'armes sur les cadavres des policiers et des militaires tués, répond déjà à la question de la trêve du Gspc. Cette cellule active a déjà perpétré plusieurs assassinats ciblés à Alger, dont le plus retentissant reste celui commis contre l'imam d'El Harrach, Abdennacer Abou Hafs, et pose des problèmes, insolubles jusque-là, pour les responsables de la sécurité intérieure. Cependant, le discours résolument, absolument et ostensiblement pacificateur du président de la République peut, à terme, aboutir à une deuxième vague de repentis, pour peu que le contexte politique retrouve «l'élan sécuritaire » de 1998 à 2000. Pour le moment, à l'échec de «l'islamisme constitutionnel», répond la turbulence et l'impatience de «l'islamisme insurrectionnel». Les résultats très insignifiants obtenus par le MSP, le MRN et Ennahda consacrent l'échec de l'intégration d'un islamisme aux objectifs imprécis dans le jeu équivoque d'une démocratie aux contours flous.