Sans qu'elles conviennent expressément de faire front, les deux formations islamistes se rejoignent dans la forme et dans le fond. Le MSP de Bouguerra Soltani et El Islah de Abdallah Djaballah n'ont jamais été aussi proches dans le discours que depuis la décision du gouvernement de passer à la phase active de l'amendement du code de la famille. Spontanément, une alliance entre les deux partis est en train de poser ses premiers jalons alors qu'ils se sont livrés une guerre politique des plus tenaces avant et après l'élection présidentielle du 8 avril 2004. Sans qu'elles conviennent expressément de faire front contre ce qu'ils considèrent comme «le projet de l'occidentalisation de la famille algérienne», les deux formations islamistes se rejoignent, cependant, dans la forme et dans le fond quant à leur démarche visant à faire échouer le code de la famille dans sa nouvelle version. Probablement, ils seront les seuls partis à dire «non» lors de la prochaine soumission au débat parlementaire dudit code, spécialement au niveau de la chambre basse où ils peuvent faire barrage au projet. Abderezak Mokri, chef du groupe parlementaire du MSP, veut donner à la résistance islamo-conservatrice une dimension plus large, tout en niant tout contact avec le MRN de Djaballah. «Le code de la famille tel que le gouvernement entend réformer n'indispose pas uniquement notre parti ou celui d'El Islah.» Il va jusqu'à suggérer que des pans entiers de la société s'opposeraient au projet du gouvernement: «Un large mouvement spontané où figureront les Oulémas musulmans algériens, les Beni M'zab ainsi que certaines organisations, se mettra inévitablement en travers de cette réforme en totale contradiction avec nos valeurs ancestrales». Les propos de M.Mokri véhiculent en filigrane un objectif implicitement avoué qui consiste à contester le projet de réforme du code de la famille sans faire de vagues, et ce, en s'appuyant sur d'autres entités politiques ou associations conservatrices qui se réclament ouvertement de l'opposition. Il se comprend, donc, via ce message que le MSP demeurera fidèle à sa sempiternelle stratégie de prendre «le juste milieu». Car, faire preuve d'initiatives politiques contre l'un des chantiers phares contenus dans le programme du président de la République, signifierait tout bonnement l'effondrement de l'alliance présidentielle. Mais la conception de M.Mokri paraît dans une certaine mesure un tantinet invraisemblable puisque la bataille est d'abord politique. Les associations, dont il s'agirait, pourraient au mieux assumer un rôle d'appoint. Loin de la discrétion et le ton mesuré du MSP, le MRN semble choisir une approche foncièrement différente. Son leader a recommandé déjà à ses troupes d'affûter leurs armes pour empêcher le code de la discorde «même par un coup de force s'il le faut». Une position qui n'est une surprise pour personne étant donné que le malheureux candidat à la dernière présidentielle a fait de la lutte contre les réformes de l'école et du code de la famille son cheval de bataille. Au-delà de l'attitude soft adoptée par le MSP d'une part et la tonitruante opposition d'El Islah d'autre part, il n'en demeure pas moins que les deux formations islamistes se battent pour le même idéal : mettre les bâtons dans les roues de la réforme du code de la famille.