Depuis la reprise du Hirak après 11 mois de suspension, les vendredis des manifestations de rue se suivent et se ressemblent presque. Les marches d'hier, organisées dans plusieurs villes, n'ont pas dérogé à la tradition. Le pacifisme des manifestants, la détermination d'exercer un droit constitutionnel et le professionnalisme des forces de l'ordre ont, encore une fois, fait le décor du énième vendredi de manifestations populaires. À Alger, Oran, Béjaïa, Tizi Ouzou, les marches se sont certes déroulées dans la même ambiance de sérénité, mais l'affluence qui, globalement a légèrement régressé, selon les correspondants de L'Expression et des observateurs de la scène politique nationale, a différé d'une wilaya à une autre. Ainsi, alors qu'à Béjaïa la mobilisation était intacte, à Tizi Ouzou et Annaba, l'on a constaté un recul du nombre de marcheurs. Il reste, selon les mêmes sources, que la frange des Algériens, acquis à l'idée d'un changement qui viendrait de la rue demeure visiblement convaincu de la nécessité de ces marches hebdomadaires. Mais l'autodiscipline qui caractérise chaque marcheur et qui déteint sur les foules de personnes qui ont manifesté, hier, dans une dizaine de villes du pays, n'empêche pas les ambitions dangereuses de certains groupes qui entendent piéger le Hirak de l'intérieur. C'est ainsi que des membres de Rachad ont tenté de distribuer des tracts à Béjaïa. Ils ont été empêchés par les manifestants, mais l'acte lui-même illustre assez bien la tentation de l'hégémonisme que nourrit le mouvement islamiste à l'endroit du Mouvement populaire. Son entreprise échoue à chaque vendredi, mais les slogans tout aussi dangereux parviennent à trouver leur chemin jusqu'aux oreilles des manifestants qu'ils répètent de manière quasi automatique. Les mots d'ordre de l'ex-FIS qui accablent d'anciens dirigeants du pays durant la décennie 90 ont été remis au goût du jour et réintroduits dans les manifestations. Ils rappellent très distinctement les horreurs de la violence islamiste et tentent d'inverser les rôles en innocentant totalement les criminels qui ont tué des dizaines de milliers d'Algériens. Il faut dire qu'à Alger et ailleurs, il a été constaté que des dizaines d'anciens militants du parti dissous ont investi les manifestations et étaient à l'origine des mots d'ordre qui s'en prenaient aux services de renseignements et à l'ANP. L'objectif de mettre l'Etat et ses institutions sécuritaire en minorité était plus qu'évident dans pas mal de villes aux dires des correspondants de L'Expression et autres observateurs. Même si l'écrasante majorité des marcheurs était, hier, clairement acquise aux idéaux originels du Hirak, il y a eu dans ces manifestations des groupuscules qui cherchaient autre chose qu'un simple rappel à l'Etat des revendications premières du Hirak.