La diplomatie marocaine accuse l'Algérie d'être derrière l'offre de paix proposée par le Front Polisario. «L'Algérie s'en est prise à l'initiative marocaine en se basant sur des données erronées et infondées et elle incite le Polisario à tromper la communauté internationale en invoquant une initiative qui n'a d'autre finalité que de contrarier la proposition marocaine», a déclaré le ministre des Affaires étrangères marocain, Mohamed Benaïssa, devant une commission du Parlement, de son pays. Cette intervention a été largement reprise par la presse marocaine. Selon cette dernière, le ministre de l'Intérieur de Sa Majesté Mohammed VI, Chakib Benmoussa qui s'exprimait lui aussi au Parlement et devant la commission de défense nationale, a fait remarquer que le Maroc s'oriente avec bonne volonté et un esprit ouvert et sincère vers une solution politique définitive acceptable par toutes les parties et qui garantisse la paix et la stabilité dans toute la région. Cependant, il considère que la bataille est loin d'être tranchée eu égard aux contraintes liées aux procédures jugées complexes des Nations unies d'un côté, mais surtout des «réactions hâtives et violentes» de l'Algérie, de l'autre. C'est sur ce dernier point que la position du pouvoir marocain est notoirement empreinte de mauvaise foi. A qui doit-on prêter des intentions belliqueuses? A l'Algérie ou aux courtisans du Palais marocain? La position algérienne n'a pas varié d'un iota depuis le début du conflit en 1964. Le problème du Sahara occidental a, de tout temps, été perçu comme un problème de décolonisation. Le peuple sahraoui doit choisir librement de disposer de lui-même. Du président Houari Boumediene à l'arrivée de M.Bouteflika à la tête de l'Etat algérien, l'Algérie n'a eu de casse de soutenir le peuple sahraoui dans sa lutte pour l'indépendance et à disposer d'un Etat libre et souverain. Et cela a été le cas pour tous les mouvements de libération à travers le monde. L'Algérie, cette pâte nourricière dont le Royaume marocain ne cesse de s'alimenter pour éterniser ce conflit avec une presse pieds et poings liés à sa botte qui s'en gargarise. Et le ministre de l'Intérieur marocain qui reprend, presque à l'unisson, la déclaration de son homologue des Affaires étrangères: «L'Algérie s'en est prise à l'initiative marocaine en incitant le Polisario à présenter une contre-proposition.» Des mots dictés par le Palais, Sa Majesté Mohammed VI. Et il s'en lèche les babines. L'Agence France Presse a répercuté cette déclaration, le 16 avril. Le Maroc ne veut pas lâcher le morceau. Il veut impliquer l'Algérie dans le conflit. Dans son projet qu'il a présenté le 10 avril, il prévoit une large autonomie au Sahara occidental, mais il prévient: «Les lignes rouges ne doivent pas être franchies.» Cela doit s'opérer dans le cadre de la souveraineté marocaine et de l'unité nationale. Les quotidiens marocains en ont fait largement l'écho. Le Royaume alaouite veut avaler tout cru le Sahara occidental, faire des Sahraouis des sujets. Pas de négociations avec le Front Polisario. Serait-il devenu amnésique? Et les militaires marocains faits prisonniers puis libérés, voilà quelques années, puis remis au Comité international des Croix et Croissant- Rouge (Cicr), ne les a-t-il pas reconnus et revendiqués? La proposition marocaine est considérée comme une initiative qui va lui permettre de «desserrer l'étau sur lui» au sein de la communauté internationale. Il ne veut rien savoir. Un paradoxe. «N'est pas plus sourd que celui qui ne veut rien entendre.» La diplomatie marocaine va droit dans le mur. Elle veut jouer son va-tout. L'ultime cartouche, certainement. Le Maroc veut construire la paix qu'il veut et de manière unilatérale. «Les représentants de la nation saluent hautement l'initiative sage de Sa Majesté Mohammed VI visant à conférer aux provinces du Sud un statut d'autonomie en tant que solution politique et définitive du conflit artificiel dans la région, dans le respect de la souveraineté du Maroc...», a rapporté, hier, la presse marocaine. Le secrétaire général des Nations unies, M.Ban Ki-moon, ainsi que le Conseil de sécurité, risquent, très fort, de ne pas l'entendre de cette oreille.