Les écrivains souhaitent des lecteurs; les lecteurs souhaitent des livres. La chronique Le Temps de lire essaie de donner, aux écrivains et aux lecteurs, le goût de quelque chose qui ressemble à un bonheur pur trouvé dans la pratique, pour les premiers, de l'écrire; pour les seconds, de la lecture. Ainsi que cela a été annoncé (voir L'Expression du 06.07.2008, p. 21), voici extraite de notre rubrique hebdomadaire, la deuxième liste d'ouvrages dans laquelle nos lecteurs pourraient puiser l'objet de l'objet de leur propre «Temps de lire» pendant l'été... Kalila et Dimna, Ibn Al-Mouqaffa, Alpha éditions: «La fable a toujours fourni à ‘‘l'honnête homme'' les codes de la bienséance pour s'instruire. Les éditions Alpha nous en donnent un bel exemple en publiant Kalila et Dimna d'Ibn al-Mouqaffa dans une version française de Ayoub Barzani, un Kurde irakien, né en 1945, installé à Genève en 1992, ville aussi où est né, en 1977, Simon Kroug, l'illustrateur de la présente traduction. Kalila et Dimna compte parmi les oeuvres les plus populaires de la littérature mondiale. Il faut rappeler qu'à l'origine, il s'agit d'une traduction libre, en arabe, vers 750, par Ibn al-Mouqaffa, d'un texte persan (le pehlevi ou moyen iranien) du VIe s., lui-même adapté d'une compilation de fables animalières du Pañchatantra, des contes indiens, en sanskrit du Brahmane semi-légendaire, Bidpaï, vers 300 av. J.-C. Ce sont les aventures de deux chacals en relation avec d'autres animaux (le Roi Lion, le Singe, le Renard, le Rat Zîrek, la Colombe, le Corbeau,...) qui vivent des situations «psychosociales» comparables à celles des humains. Justement, le philosophe Baydaba extrait de ces situations la substance moralisatrice et, utilisant un moyen pédagogique efficace, il répond, par parabole et avec une souveraine conviction, aux préoccupations de Debchelim, Roi du peuple indien... Le Maure d'Andalousie, José Antonio González Alcantud, éd. L'Archange Minotaure: Avec cet ouvrage, l'auteur vient essayer, à son tour, d'apporter quelque clarté sur la problématique si importante et si gênante à la fois d'un mythe pur produit de l'histoire humaine, - et non pas seulement sur l'interprétation de l'Islâm et de la Chrétienté dans la péninsule Ibérique. Ce mythe a tout le caractère de l'être exclu: le Maure d'Andalousie. Connaître cet être, souvent c'est être soi-même, si l'on n'est tout de passion consciente, conduit à nier une sûre et certaine identité de l'être, laquelle pourtant fixe, fût-ce par le seul langage, ce que l'auteur irréductiblement engagé appelle «notre matérialité la plus immatérielle». Or le langage est essentiel: il nous dit et nous distingue de notre semblable avec lequel nous partageons une terre de vie commune, une patrie, mais aussi il nous définit bien au-delà de l'histoire des pays méditerranéens. Le Maure a-t-il droit à sa part indivisible dans la vie quotidienne en Espagne? Harry Potter et les Reliques de la mort, J. K.Rowling: «Qu'est-ce qui enflamme à ce point le psychisme des lecteurs des Harry Potter? [...] Le succès est phénoménal au-delà des frontières de la Grande-Bretagne pour plusieurs raisons parmi lesquelles le choix juste, diversifié et varié des ingrédients qui éveillent l'intérêt du lecteur, qui déclenchent en lui de l'engouement, qui lui offrent à la fois le rêve et la réalité, c'est-à-dire avant tout un contenu éducatif, une écriture éloquente, un ton de bon goût et un univers magique inspiré d'un univers transcendé et pourtant ancré dans l'univers de la vie quotidienne. [...] La question, pour nous Algériens, est pourquoi ce livre est-il recherché chez nous (en dépit de son grand format, de son épaisseur et surtout des réclamations au sujet de son prix de vente trop élevé) et vraiment lu par les jeunes dès l'âge de onze ans? Certes, on peut "accuser" l'énorme publicité qui entoure ce livre, mais...dans les pays où il est arraché dès sa parution, les jeunes lecteurs lisent. Ils ont appris à lire, à lire, à lire...»