Après avoir envoyé ses milices envahir le siège du gouvernement d'union nationale, issu de l'accord de paix de l'ONU, l'ancien gouvernement parallèle de Tripoli s'est remis hier en action. Enième retour à la case départ en Libye. La communauté internationale et le Conseil présidentiel qu'elle soutient devra désormais travailler avec une nouvelle donne qui risque de compromettre un processus de paix déjà trop fragile. L'ancien gouvernement de Tripoli, sous contrôle de Fajr Libye, une coalition de milices issue de Misrata, a annoncé reprendre ses fonctions, alors qu'à l'est du pays, l'autre exécutif parallèle, installé à Tobrouk et dirigé par Abdallah Al-Theni, continue d'assumer ses fonctions. L'annonce a été faite dans la nuit de vendredi à hier, à la télévision, par le chef de l'ex-gouvernement de Tripoli, Khalifa Ghweil, qui a lu un communiqué affirmant que le "gouvernement de salut national" a repris ses fonctions. Quelques heures auparavant, des miliciens avaient envahi et pris le contrôle du siège du Conseil présidentiel, dirigé par Fayez As-Serraj. Ce dernier a dénoncé cette violation via un communiqué qu'il a publié sur sa page officielle Facebook tard dans la nuit. "La prise de contrôle du haut conseil présidentiel n'est autre qu'un pas de plus et une poursuite des tentatives d'entrave à la mise en œuvre de l'accord politique, le fait d'un groupuscule qui refuse cet accord, après avoir démontré son incapacité à diriger le pays", lit-on dans ce communiqué, dans lequel aucun nom n'a été cité. Mais le texte faisait référence aux leaders politiques du gouvernement parallèle de Tripoli, en premier lieu Abou Sahmein qui est toujours sous des sanctions de l'Union européenne, avec son homologue du Parlement élu de Tobrouk Aqila Saleh. Ces deux dirigeants politiques ont rejeté l'accord de paix, sous sa forme actuelle, et refusent donc d'accorder leur confiance à l'exécutif de M. As-Serraj, sans quoi il ne peut pas assumer pleinement son mandat, sous l'égide de l'ONU. Par ailleurs, le GNA a promis d'arrêter "les politiciens qui (...) tentent de créer des institutions parallèles et de déstabiliser la capitale". Mais Fayez As-Serraj a-t-il vraiment les moyens pour cela ? Certainement pas, en plus du fait qu'il ne peut jouer ce jeu de la surenchère, dans un contexte où il est surtout tenu de rester sur la voie du dialogue et de la réconciliation. "De telles actions visent à créer des institutions parallèles et à entraver la mise en œuvre de l'accord politique en Libye", a réagi de son côté, sur son compte twitter, Martin Kobler, le représentant spécial du Secrétaire général de l'ONU en Libye. Pour rappel, Khalifa Ghweil a continué de publier des communiqués et d'utiliser le cachet de son ancien gouvernement, mais il s'est mis en veilleuse après avoir été un peu affaibli par la défection de nombreux responsables politiques de sa coalition et des milices qui ont rallié soit les forces dirigées par le GNA ou noué d'autres alliances avec les autorités parallèles de l'Est libyen. Cela dit, le régime des sanctions internationales n'est, pour le moment, pas la réponse adéquate pour faire revenir l'ordre institutionnel en Libye. Encore moins une intervention militaire étrangère pour permettre au GNA de poursuivre sa mission. Lyès Menacer