En dépit du confinement sanitaire, l'interdiction de sortie et le risque d'être interpellé, des manifestants ont protesté samedi dans la soirée, à Ouled Khelifa, un village de la commune de Djâafra, à une cinquantaine de kilomètres au nord du chef-lieu de la wilaya de Bordj Bou-Arréridj, pour dénoncer une série d'arrestations devenues presque systématiques après chaque apparition d'un activiste ou message sur la Toile. Cette marche nocturne, la première depuis le début de la pandémie de coronavirus, a drainé une foule nombreuse. Les manifestants, qui ont bafoué la mesure de confinement instaurée dans le cadre de la lutte contre le coronavirus, ont sillonné les différentes ruelles de la localité. Munis de l'emblème national et de l'étendard amazigh, des dizaines d'habitants se sont rués vers Thadjmaâth (centre du village), juste après le f'tour. L'ambiance est plutôt festive, des groupes de jeunes, dont des militants et des étudiants, ont décidé de protester de nuit contre les arrestations des activistes. Ils ont renoué à l'occasion avec les slogans chers au hirak. Dans la soirée, après la rupture du jeûne, nous confie Akli, un habitant du village, une procession humaine a commencé à sillonner les rues du village en criant : "Libérez les détenus, ils n'ont pas vendu de la cocaïne !'', "Etat civil et non militaire !'', "Algérie libre et démocratique !'', "Nous sommes les enfants d'Amirouche, nous ne ferons pas marche arrière, nous arracherons la liberté'', entre autres. "Nous voulons en plus montrer à ce pouvoir que le hirak n'est pas mort. C'est juste une pause à cause du coronavirus", dira un activiste de la région, qui ajoute que si le pouvoir n'arrête pas les intimidations, les marches de protestation vont reprendre. "C'est le pouvoir avec ses arrestations, ses décisions, ses intimidations, ses provocations qui pousse les activistes à revenir aux manifestations", martèle-t-il. Le mouvement s'est poursuivi pendant près d'une heure, indiquent des sources locales, avant que les marcheurs ne se dispersent dans le calme. Face aux risques sanitaires, des appels à l'apaisement, émanant de citoyens notamment, ont été lancés sur les réseaux sociaux. "Je demande aux jeunes de ne pas répondre aux provocations du pouvoir, surtout en cette période de pandémie. Cette action est risquée. Ce genre de rassemblement favorise la propagation du coronavirus. La lutte contre le Covid-19 impose le respect strict des mesures barrières, telles que la distanciation sociale et le port du masque de protection. Ce qui est loin d'être de mise dans une marche", dira Hamza, un activiste de la première heure qui appelle les jeunes à respecter les consignes du confinement. "Notre mouvement ne s'arrête pas dans le temps ou en arrêtant des activistes. Ces agissements du pouvoir ne dévieront pas le hirak de son chemin tracé vers un Etat de droit", rappelle-t-il. Chabane BOUARISSA