"Un Président doit être entouré d'une équipe capable de mettre en œuvre ses orientations politiques en tenant compte de plusieurs paramètres", nous explique un ancien ministre. Les rumeurs sur le départ du gouvernement se font de plus en plus insistantes et les critiques portées par le chef de l'Etat, Abdelmadjid Tebboune, à son Exécutif, avant son départ pour l'Allemagne, ne font que renforcer l'idée que les jours de l'équipe dirigée par Djerad sont comptés. Les propos tenus pour qualifier l'action du gouvernement ne souffre aucun doute sur les intentions du président Tebboune de procéder à un changement profond de l'Exécutif. Toutefois, les lectures faites sur ces conjectures se sont concentrées uniquement sur le fait lui-même : le changement. Comme si un lifting du gouvernement devrait mettre fin aux tâtonnements constatés dans son action. Mais rien n'est dit sur les objectifs du changement, la nature du futur Exécutif, le choix des hommes... Indépendamment donc du changement qu'envisage d'opérer le président Tebboune au sein de l'Exécutif, s'interroger sur la couleur de la future équipe est une question qui se pose avec acuité. Compte tenu de la conjoncture actuelle, marquée principalement par une crise économique, sanitaire, sociale et politique complexe, le choix des hommes à désigner apparaît crucial. Tebboune se suffira-t-il de reconduire des technocrates au sein de l'Exécutif ou optera-t-il pour des politiques pour mener à bien la mission ? La réponse, à vrai dire, est dans la lecture que font les hautes autorités de la crise qui secoue le pays. Cela dit, il est inopportun d'avancer un quelconque pronostic si l'analyse faite de la situation générale du pays ne s'appuie pas sur les mêmes mécanismes et les mêmes données qui s'offrent aux observateurs en dehors des cercles de décision. Inerte et atteint d'une léthargie qui l'a quasiment bloqué, surtout durant la période d'hospitalisation du président en Allemagne, seuls quelques ministres ont tenté, tant bien que mal, de tirer leur épingle du jeu. D'autres se sont presque effacés, réduisant la fonction ministérielle à la gestion des affaires courantes. Il est indispensable de redéfinir le rôle d'un ministre. Il l'est d'autant plus que l'action d'un Exécutif est d'abord une démarche d'acteurs dans une politique publique tracée et arrêtée pour des objectifs bien identifiés. Or, sans politiques pour tracer un cap, la technocratie réduira, inévitablement, la portée des projets à de simples dispositions administratives. "Un Président doit être entouré d'une équipe capable de suivre ses orientations politiques pour les concrétiser en tenant compte de plusieurs paramètres", nous explique un ancien ministre, qui a requis l'anonymat. Pour lui, "tout projet doit être formulé d'une manière politique" et "un ministre doit jouer ce rôle". En somme, notre interlocuteur plaide pour un gouvernement "de politiques", seul à même de booster l'action gouvernementale. Contacté par Liberté, un chef d'un parti voit les choses autrement. Pour lui, "sans un gouvernement d'union nationale où toutes les mouvances seront représentées, point d'Exécutif politique". Notre interlocuteur plaide, quant à lui, pour un gouvernement de technocrates "pour éviter toute démarche politique contraire aux orientations du Président, comme c'était le cas avec la défunte Alliance présidentielle". Il indique, néanmoins, que "le renforcement des prérogatives des élus, notamment celles des députés, sera un atout pour l'Exécutif dont l'action sera constamment sous la loupe d'un contre-pouvoir". Même si les avis divergent sur la composante du futur gouvernement, il est avéré que le constat fait de la conjoncture reste le même, à savoir l'urgence de la reprise en main de la décision politique, notamment avec un mouvement populaire qui n'a pas encore dit son dernier mot. À une problématique politique, la solution ne peut être que de même nature. Mohamed Mouloudj