Pour son dernier vendredi du ramadhan, la ville de Yemma Gouraya a drainé des milliers de citoyens. Les rues du chef-lieu de wilaya ont été submergées par une véritable marée humaine jamais enregistrée depuis la reprise des marches hebdomadaires par le Hirak. Il était à peine 13h lorsque la procession humaine s'est ébranlée de l'esplanade de la maison de la culture Taous-Amrouche. Arborant, comme toujours, le drapeau national et l'emblème amazigh, et des pancartes sur lesquelles ont été transcrits les slogans appelant à l'édification d'un Etat de droit et social, à la libération des détenus d'opinion et à une presse libre et une justice indépendante, la marche a démarré sous les slogans forts exprimant le rejet total des élections législatives prochaines. "Ulac l'vot ulac" (pas d'élection), "Ulac tekmamin, ulac tifranin" (pas de muselière, pas d'élection), ont scandé les manifestants. Organisée sous forme de carrés, l'impressionnante marée humaine n'a cessé, tout au long de l'itinéraire de la marche, de clamer haut et fort des slogans hostiles au pouvoir, malgré le jeûne en cette journée printanière. "Y en a marre de ce pouvoir", "Ne touchez pas à la Kabylie", "Libérez les otages" (les détenus), "Djazaïr hourra démocratia" (Algérie libre et démocratique) sont autant de slogans qui ont rythmé cette 116e marche du Hirak à Béjaïa. Des slogans appuyés par des pancartes brandies par des manifestants et sur lesquelles on pouvait lire, entre autres, "Tifranin n 12 yunyu, d-asedjhed udabu" (les élections du 12 juin, c'est le renforcement du pouvoir), "La Révolution germe dans les consciences", "Le peuple rejette la parodie législative" et "Un Etat algérien sous la forme d'une République démocratique et sociale et non la restauration d'une monarchie révolue" (un extrait des résolutions de la Charte de la Soummam) avec explicitations. "Ni militaire ni théocratique. Algérie libre et démocratique." Ce dernier slogan, brandi aux côtés des portraits des deux artisans du congrès de la Soummam, Abane et Ben M'hidi, aétait d'ailleurs dominé dans la marche d'hier. À noter que les slogans appelant au rejet des législatives anticipées du 12 juin ont été également les plus scandés par les manifestants tout au long de l'itinéraire de la manifestation. Après avoir sillonné les artères principales du centre-ville en passant par la rue de la Liberté et le boulevard Amirouche, les manifestants se sont dispersés dans le calme.