Les mille deux cents congressistes de l'UGTA se retrouvent, à partir d'aujourd'hui et pour trois jours, à l'hôtel El-Aurassi pour une grand-messe syndicale qu'est leur 11e congrès. Un rendez-vous crucial, placé par Abdelmadjid Sidi-Saïd et ses collaborateurs du secrétariat national sous le slogan “Stabilité, solidarité, modernité”. Un triptyque qui épouse parfaitement l'identité de ce syndicat à cheval entre la revendication syndicale et la présence politique aux côtés des forces patriotiques pour la défense de la République. Jeudi, entre deux réunions avec ses collaborateurs pour mettre la dernière touche aux préparatifs, Sidi-Saïd a bien voulu nous accorder quelques minutes pour situer l'ambiance et les enjeux du congrès. “Les préparatifs se déroulent dans un climat serein. Les représentants des travailleurs sont conscients d'aller vers un congrès porteur d'espoir qui doit renforcer l'organisation et augmenter ses capacités de travail, d'écoute et de prise en charge des travailleurs”, résume-t-il. Dans une des réunions des fédérations à Zéralda, le patron de l'UGTA avait parlé de “syndicat de proposition”. Il explicite le concept qui sera pour les années à venir la philosophie sous-jacente de la centrale convaincue du caractère inéluctable des réformes économiques. “Le mouvement doit comprendre et doit être un élément qui doit favoriser la proposition et la sérénité. Tout se gagne dans le respect des partenaires, d'une vision collective solidaire. La violence n'a jamais mené à quoi que ce soit. Nous voulons privilégier dans notre démarche la consultation et le dialogue pour faire avancer la cause des travailleurs.” Les initiés verront dans cette tirade une pierre jetée dans le jardin des syndicats autonomes. Sidi-Saïd se défend de nourrir une quelconque prévention à leur égard. “Au risque de me répéter, je ne nourris aucune animosité à l'égard des syndicats autonomes ; c'est la synergie collective qui doit compter par-dessus tout.” Ces vérités étant dites, Abdelmadjid Sidi-Saïd et son équipe se présentent ce matin devant les congressistes avec un bilan contenu dans un document de deux cents pages qui sera distribué. “Nous allons laisser parler les chiffres”, dit-il. En fait ce document est la mise en chiffres et en graphes de ce que la direction de l'UGTA considère comme des acquis réalisés depuis qu'elle est aux commandes de la centrale. “L'objectivité de nos revendications et de nos propositions et la recherche de convergences avec nos partenaires dans la concrétisation des objectifs ont permis d'aboutir à des résultats non négligeables.” Parmi ces résultats mis en évidence dans le document, les augmentations des salaires successives sous les différents chefs du gouvernement. Ainsi de 1994 à 2006, ce n'est pas moins de quatre augmentations qui sont obtenues. Soit un pourcentage de 45% auquel il faut adjoindre les augmentations générales de 2006, allant de 2 500 à 8 500 DA pour 1 511 659 travailleurs. Le document met en relief également l'incontournable problème des salaires impayés et son évolution depuis les années 1990. Son traitement dans le cadre des différentes bipartites, tripartites, groupes de travail a permis le versement des salaires à 243 000 travailleurs pour une enveloppe de 29 milliards de dinars. Autre dossier : celui des décisions de justice. En tout 4 814, dont 3 470 ont été exécutées intégralement, 1 011 partiellement, en cours de traitement 333. Les institutions publiques viennent, de toute évidence, en tête avec 4 517 cas, suivies des administrations publiques avec 196 cas, les entreprises privées arrivant en dernier avec seulement 101 cas. Entre 2000 et 2007, pas moins de 478 affaires sont prises en charge par la centrale qui les a payées de sa propre “caissette” pour un montant de 5 748 590 DA. Dans ce document, qui foisonne de renseignements, il est noté que 35% des confits sociaux ont pour origine les salaires et les indemnités, 14% les salaires impayés, 3,5% les contestations de l'encadrement. Autre acquis mis en avant dans le document, la convention collective conclue avec les principales organisations, à savoir les CAP, CNPA, CGEOA, CIPA, SEV. Mais la grande affaire de l'UGTA reste pour sa direction le fameux pacte économique et social qu'on présente comme un paradigme référentiel en matière d'arbitrage et de dialogue social. “Le pacte économique et social n'est point un accord inscrit dans une vision limitée aux attentes des partenaires que sont les travailleurs et les employeurs. Il est un engagement pour la mobilisation des capacités nationales au service du développement et de la justice sociale, en un mot un engagement à la mobilisation au service de l'Algérie.” Tel est le fondement de ce pacte dont la finalité est d'accompagner le passage de notre économie à la phase de l'après-pétrole dans un climat de permanente concertation entre les partenaires de ce pacte, à savoir le syndicat, le patronat et les pouvoirs publics. C'est avec ce bilan, qu'il considère en son âme et conscience positif, que Sidi-Saïd se soumet au jugement des congressistes, en espérant certainement, in peto, un retour d'ascenseur. C'est-à-dire un plébiscite pour une “ouhda thalitha”. En tout cas, Abdelmadjid Sidi-Saïd a réitéré à M. Bouteflika “haut et fort”, jeudi par le canal de Liberté, son appel à briguer un troisième mandat, “pour lui permettre de poursuivre son œuvre en faveur de l'Algérie et des travailleurs”. N. Sebti