Les auditions ramadhanesques que le Président Bouteflika a érigées, depuis quelques années déjà, en véritable rite, alors qu'elles ne correspondent à aucun cadre constitutionnel légal, se sont achevées avec la présentation de la situation au sein du ministère de l'Intérieur, gros département s'il en est. Mais la question que tous les observateurs se posent est de savoir quelle est la finalité de ces auditions. S'agit-il pour le Président d'être mis au parfum des indicateurs socio-économiques et politiques du pays alors qu'il avait toute la latitude d'y accéder, sans avoir recours à cet oral que les ministres vivaient comme un véritable pensum, de l'avis de certains d'entre eux? Au-delà de ce questionnement, il y a lieu de se demander à quelle suite il faut s'attendre. Logiquement, ce sera un changement de gouvernement, même si les précédentes auditions n'avaient abouti à rien. Changement de gouvernement donc, car ce serpent de mer des médias est de nouveau à la une. «Au-delà de la configuration qu'il aura, ce changement est désormais inévitable», estiment les observateurs politiques. Et sauf à prendre le risque d'une paralysie, dont il est aisé d'imaginer les conséquences, particulièrement en cette conjoncture, le Président Bouteflika doit changer de fusil d'épaule car «l'équipe actuelle, arrivée depuis déjà assez longtemps au seuil de l'incompétence, est en train de collectionner déboires et incohérences», fait-on remarquer. «Faisant fi de la nécessité de la consultation, un préalable à la prise de certaines décisions, ce gouvernement verse dans l'unilatéralisme dévastateur», estiment encore certains observateurs. L'exemple qui illustre de façon patente cette attitude est «la fameuse loi de finances complémentaire». Parce que prise dans la précipitation, cette LFC, en tous cas certaines de ses dispositions, s'avère tout simplement «calamiteuse pour le fonctionnement de l'appareil économique». «Certains importateurs, pas forcément les barons du kiwi, sont même au bord de la déprime, à cause de lourdeurs bureaucratiques», affirme-t-on. Autre décision considérée comme «maladroite», et qui n'a pas de relation avec la LFC, c'est la délocalisation de la réception des véhicules importés qui se fera désormais dans les ports de Jijel et Mostaganem. Il se trouve que, considère-t-on, «ces deux infrastructures ne répondent pas aux caractéristiques de ce type d'opération». «D'ailleurs, soulignent nos sources, le directeur du port de Mostaganem a averti sa tutelle dans une correspondance, correspondance qui risque d'ailleurs de lui causer des ennuis personnels». Et le dernier pot aux roses que l'opinion vient de découvrir, c'est les conséquences catastrophiques de l'adhésion de l'Algérie à la Zone arabe de libre échange (ZALE). Les pertes fiscales liées à cet accord sont estimées, pour le premier semestre 2009, à 4 milliards de dinars (40 millions d'euros). Officiellement, dix mois après l'accession de l'Algérie à la ZALE, aucun bilan n'a été présenté par les autorités en vue d'une évaluation. Et les opérateurs économiques avaient mis en garde contre les conséquences de cette adhésion «improvisée au nom de critères purement politiques et le gouvernement avait fait la sourde oreille» devant ces critiques. Pourtant, ce même gouvernement avait toute la latitude de tirer les enseignements de l'accord d'association signé avec l'Union européenne, qui sera d'ailleurs partiellement renégocié en septembre 2010. Dans ce même registre, on peut aussi citer la réévaluation des coûts de réalisation de l'autoroute Est-Ouest qui nécessite une rallonge de 3,5 milliards de dollars. «Toutes les personnes qui connaissent le dossier sont formelles à ce sujet, sauf Omar Ghoul qui persiste à soutenir officiellement le contraire pour sauver la face», note-t-on encore. «Entêtement, puis recul», disent les observateurs qui parlent désormais, quoiqu'à demi-mot, de certains projets risquant tout simplement de passer à la trappe, alors que ce gouvernement les présentait, il n'y a pas si longtemps, comme faisant partie de sa feuille de route. Entre autres, le découpage territorial, la grande mosquée d'Alger et l'extension de certains projets ferroviaires.