On dit que le travail c'est la santé. On dit aussi qu'il vaut mieux user des souliers que des draps. Toujours est-il que travailler devient de plus en plus nécessaire : pour gagner sa vie, s'épanouir, acquérir de l'expérience ou tout simplement passer du temps. Eh oui, passer du temps. Et nombreux sont ces étudiants qui ont déjà choisi de travailler pendant leurs vacances d'été. Prendre des vacances et profiter d'un repos bien mérité, après une année universitaire chargée, c'est le désir des étudiants dans leur écrasante majorité. Aller à la mer, changer d'air, voyager ou s'éclater avec les copains, le menu des loisirs est déjà dans leur tête. Toutefois, tous les étudiants ne se ressemblent pas... ni la façon d'occuper leurs vacances aussi. Si pour certains les vacances sont synonymes de repos, c'est, pour de nombreux autres, une occasion pour dénicher un petit boulot. Karima est l'une d'entre ceux-là. Etudiante en 4e année de médecine à l'université de Tizi Ouzou, elle travaille, depuis trois ans, pendant ses grandes vacances. Studieuse, dynamique, issue d'une famille aux modestes revenus, «bosser» pendant l'été n'a pas été pour elle un choix, mais une obligation. «Mon père qui nourrissait toute la famille est décédé il y a cinq ans. Ma mère a fait de son mieux pour assurer la relève. Elle s'est usée à la tâche. Maintenant, c'est à moi de lui ramener de quoi se nourrir, s'habiller, se soigner. La prendre en charge, quoi !» explique-t-elle simplement. La petite orpheline à la bravoure exemplaire n'en démord pas. «Mon travail aujourd'hui en tant que vacancière ne peut peut-être pas nourrir ma famille, mais il me permet, au moins, d'alléger un peu le poids que je suis pour elle. Pendant trois mois, je travaille en tant que garde-malade. Ce que je gagne, je le mets de côté jusqu'au dernier centime pour la prochaine rentrée universitaire. Ce n'est certes pas beaucoup d'argent, mais au moins cela me permet d'acheter mes livres, de payer les frais de la cité universitaire et du COUS et de m'acheter quelques vêtements nécessaires», poursuit Karima, pour qui travailler alors que les autres se reposent ne la dérange pas. «Je ne suis pas née avec une cuillère en argent dans la bouche. Et, travailler pendant les vacances peut se révéler aussi une bonne manière de bien passer ces mêmes vacances», conclut-elle doctement. Travailler : «c'est pour moi, mais aussi pour les autres» Aymen a 22 ans, il est étudiant en architecture à l'université de Blida. Adhérent à plusieurs associations, il a aussi un petit job pour l'été. «Dans quelques jours, je vais commencer comme animateur dans une colonie de vacances. C'est la deuxième fois que je fais ça, et j'en tire un grand plaisir. Mais entre nous, ce n'est pas pour cela que j'ai choisi de travailler pendant l'été. J'active au sein de deux associations, et je suis membre d'un groupe de volontaires. Tout l'argent que je gagne va à ces derniers», avoue Aymen non sans une certaine gêne. Pour lui, quand on fait du bien, «on ne doit pas le chanter sur tous les toits». Brave, discret et affichant toujours un sourire espiègle, il ajoute qu'en parallèle il apprend beaucoup au contact des enfants, ainsi que des autres animateurs. «Travailler, c'est pour moi, mais aussi pour les autres. C'est ça la vie. Chacun de nous a besoin de l'autre», souligne-t-il. Tout comme Aymen, Nazim travaille aussi pour aider les autres. Ceux qui n'ont pas la chance qu'il a de bien s'habiller, de manger à sa faim et d'avoir un toit au-dessus de la tête. Etudiant en économie de gestion à l'université de Boumerdès, il a fait des des pieds et des mains pour décrocher «un petit quelque chose pour l'été». «Ce n'est pas vraiment fameux. Pendant deux mois et demi, je travaillerai en tant que plongeur dans un restaurant de la côte, et ce, de 8h à 23h, avec deux pauses pendant la journée. Ce qu'on me donne comme rémunération est quand même intéressant, d'autant plus que je prends tous mes repas dans ce resto», indique-t-il. Mais qu'est-ce qui a bien pu pousser Nazim à travailler comme plongeur ? Eh bien, c'est l'amour et la compassion qu'il a pour ceux qui sont dans le besoin. Depuis quelques années déjà, il travaille pendant ses vacances. Ce qu'il y gagne va tout droit aux pauvres. «Chaque année, j'essaie de prendre en charge la nourriture d'une famille nécessiteuse pendant le mois de Ramadhan. Personne ne m'a demandé de faire ça, mais la vie est une roue qui tourne et, qui sait, peut-être qu'un jour je serai dans le besoin moi aussi et que j'aurai besoin de l'aide des autres», explique-t-il, nous laissant pantois devant tant d'abnégation, d'altruisme et d'humilité. Passer de bonnes vacances, c'est aussi travailler Tel est le credo de Nadia, qu'elle a bien hérité de ses parents. Etudiante en littérature anglaise à l'université d'Oran, fille d'un couple de médecins, elle a appris dès son jeune âge à assumer ses responsabilités. «Etudiants, mes parents ont toujours travaillé pendant les vacances d'été pour pouvoir financer leurs études et acheter leurs fringues. Aujourd'hui, moi, même si je ne suis pas dans le besoin, je suis les pas de mes parents en travaillant pendant les moins de juillet, août et septembre. Je travaille en tant que traductrice. C'est si enrichissant et pas du tout contraignant», rapporte Nadia pour qui travailler, au lieu que cela soit une corvée, peut se révéler une richesse et un bonheur inattendus. «Outre l'argent, aussi peu soit-il, que je gagne, j'acquiers de l'expérience, je rencontre des gens et j'apprends énormément. Tout cela me repose. Quelles meilleures vacances donc que celles-là !», atteste-t-elle. Merouène, lui, est étudiant en génie civil à l'université de Laghouat. Une fois les grandes vacances arrivées, il n'hésite pas à retrousser ses manches, à porter un vieux blue-jeans et des pataugas pour aller proposer ses services en tant que manœuvre sur des chantiers. «Ce n'est qu'en travaillant et en dépensant de l'énergie que je peux me reposer. Manœuvre est donc ce qu'il me faut. Je travaille pendant l'été et je mets tout l'argent que je gagne de côté pour plus tard. Pour la rentrée. Depuis que je travaille, je me sens plus mûr, plus responsable, et je connais mieux la valeur de l'argent gagné à la sueur de mon front», confie-t-il, heureux de papoter un brin avant d'aller rejoindre le chef de chantier. Travailler pendant les grandes vacances, comme viennent de le démontrer ces étudiants, est bénéfique à plus d'un titre. Outre l'argent que l'on gagne, acquérir de nouvelles connaissances, rencontrer de nouvelles personnes, se responsabiliser et, surtout, mieux occuper son temps, sont autant de choses à gagner. Et encore une fois, des étudiants viennent d'en donner la preuve. Respect !